L’auteur, ou plus exactement l’initiateur et premier auteur de l’Inventaire général est un moine de l’abbaye, Dom François Thomas, qualifié en 1681 de « frère procureur » (Arch. nat., LL 1228, Relevés des délibérations capitulaires, au 31 mars 1681). Son confrère Dom Michel Félibien rendit à sa personne et à son œuvre un hommage d’autant plus soutenu qu’il venait clore son Histoire de l’abbaye royale de Saint-Denys parue en 1706 (p. 524) :
« Depuis environ vingt ans, celuy des religieux de Saint-Denys qui eut plus de part au maniement des affaires temporelles fut Dom François Thomas [en marge : natif de Nogent-le-Rotrou au diocèse de Chartres], dont je ne puis assez louer la vertu, la sagesse et l’assiduité au travail. Mon sujet m’engage de marquer icy qu’il dressa un ample extrait en forme d’inventaire de toutes les chartes de l’abbaye de Saint-Denys depuis le premier siècle de sa fondation jusque vers l’an 1500. Ce travail qui luy a cousté près de dix ans est le fruit d’une patience incroyable, et l’ordre joint à l’exactitude qu’il y a apportée pour rendre son ouvrage utile est la preuve de son bon esprit et de sa profonde intelligence dans les affaires. Aussi ne manquoit-il pas d’expérience, ayant eu pendant plus de trente années la conduite du temporel dans plusieurs monastères et dans Saint-Denys même, où après s’estre acquité de son employ avec beaucoup d’honneur et d’édification il obtint par ses instances réitérées d’en estre déchargé, afin de vivre plus retiré et mettre quelques années d’intervalle entre la dissipation presque inséparable du maniement des affaires temporelles et le repos de l’éternité [en marge : il mourut le 11 novembre 1698, âgé de 69 ans]. Exemple qui doit servir d’instruction à tous ceux qui passent la meilleure partie de leur vie dans les mêmes fonctions. »
Un ou plusieurs continuateurs anonymes ont donc pris la suite de Dom Thomas, trente ans durant, jusqu’à la mise au propre actuelle, parfaitement homogène. Mais ils ne se contentèrent pas de poursuivre l’inventaire après 1500 ; ils remanièrent aussi l’ensemble du texte, non sans de menues incohérences. C’est ainsi que, dès le tout début de l’Inventaire, la notice n° 2 identifie le possesseur d’un manuscrit « en la présente année 1688 », mais cite aussi l’ouvrage de dom Félibien paru en 1706 ; et que l’on mentionne en note à la notice n° 3 : « Il n’existoit du tems de Dom Mabillon et de Dom François Thomas qu'une copie bien postérieure à Dagobert ».
Une fois la compilation achevée, elle reçut encore quelques additions clairsemées et cursives (nouveaux regestes, souvent brefs et très cursifs, en fin d’année ; signalement d’originaux retrouvés…).
Passé aux Archives nationales, l’Inventaire général demeura vivant ; au XIXe siècle, en effet, un archiviste numérota les regestes (originels comme ajoutés) à l’encre rouge, dans une suite continue que nous utilisons encore comme le moyen le plus commode de citation (échappent à la numérotation quelques regestes d’actes apparemment insérés pour intéresser l’histoire de l’abbaye sans être à son chartrier : nous les avons numérotés dans une série à part d’actes « non numérotés »). On retrouve aujourd’hui, de la même main et de la même encre, ces numéros portés au dos de certains originaux de la série L des Arch. nat., trace d’une tentative inaboutie de récolement des restes du chartrier.